Dans cette note, notre délégué général expose les réflexions qui motivent l’action de notre réseau et invite les acteurs de notre organisation à faire évoluer ce texte.
1 – Nous vivons un paradoxe étonnant puisque l’immense majorité des êtres humains recherche le bien-être et la paix et nos médias parlent essentiellement de guerres et de violence.
Cette aspiration à la paix remonte à des temps immémoriaux. Elle a toujours coexisté avec la folie guerrière de dirigeants avides de gloire, de richesses, de distinctions, de médailles, etc. Ces dirigeants sont souvent assez cyniques pour inventer des propagandes capables de convaincre les peuples victimes de se faire la guerre. La guerre n’est-elle pas « le massacre de pauvres gens qui ne se connaissent pas au profit de gens qui, eux, se connaissent, mais ne se massacrent pas » ? Comme le disait Paul Valéry…
La quasi-totalité des philosophes antiques ont consacré un ou plusieurs écrits aux bienfaits de la paix, Aristophane faisant partie des plus connus.
Aujourd’hui, l’essentiel de celles et ceux qui fuient les conflits aspirent à la paix. Celles et ceux qui consacrent des moyens importants à leur bien être quotidien individuel ou collectif, préservent leur santé, veillent à leur alimentation… aspirent eux aussi à la paix. Les exemples sont nombreux.
2 – Mais
« Nous sommes les générations de la bombe atomique » nous dit Riccardo Petrella dans son ouvrage Au nom de l’humanité, l’audace mondiale. Cette mutation dans la nature des armes est décisive.
Edgar Morin parle de « péril total ».
Nous vivons l’anthropocène, c’est-à-dire cet âge de la terre où l’hypothèse devient plausible d’une transformation telle de la biosphère par les humains qu’elle soit rendue impropre à la vie. L’arme nucléaire joue un rôle essentiel dans cette réalité.
Dans un ouvrage publié en 1930, Le malaise dans la culture, Freud alertait déjà : « Les hommes sont maintenant parvenus si loin dans la domination des forces de la nature qu’avec l’aide de ces dernières, il leur est facile de s’exterminer les uns les autres jusqu’au dernier. Ils le savent, de là une bonne part de leur inquiétude présente, de leur malheur, de leur fonds d’angoisse ». Le thème du mal-être (si répandu de nos jours au travail, à l’école, en famille…), n’est pas étranger à cette matrice « exterministe » que constitue ce que Jean Lurçat appelait « la grande menace » nucléaire dans sa tapisserie flamboyante exposée à Angers : Le chant du monde.
Ghyslain Lévy, psychiatre et psychanalyste, cite ce texte de Freud et ajoute : « L’anticipation formidable de la pensée freudienne vient trouver, dans le franchissement tout à fait inédit que représentent la science nucléaire et sa technologie appliquée à l’arme atomique, sa plus radicale confirmation » (L’ivresse du pire- de l’évaporation de l’homme-).
Cette notion « d’évaporation de l’homme » est imagée par les ombres d’Hiroshima et de Nagasaki désormais gravées dans la mémoire collective. Elle se retrouve dans les analyses du philosophe Günther Anders sous les termes d’ « obsolescence de l’homme ».
3 – La réalité actuelle a cela de nouveau, tenant à la nature des armes atomiques, qu’une guerre globale, pollution globale et systémique de la terre, impliquant immanquablement des armes atomiques, qu’elle se terminerait sans vainqueurs, sans gloire, sans histoire… et qu’elle nous prive déjà, ici et maintenant, de financements publics dont l’humanité a tant besoin, sans oublier le poids d’une telle absence de perspective sur les comportements humains contemporains.
Hiroshima et Nagasaki, le message des survivants, les « Hibakusha » (l’un des rares mots de la langue japonaise devenu universel avec tsunami…) nous permettent de comprendre cette réalité.
4 – Que faire pour continuer d’espérer ?
L’UNESCO, pour les Nations Unies, avec son Manifeste pour une Culture de la Paix adopté en 2000, propose de partager les valeurs faisant sens et société portées par les concepts constitutifs de cette notion de « Culture de la paix ». Peu connue, car récente, cette notion issue de l’expérience des grandes médiations doit devenir une sorte de « logiciel » du vivre ensemble en paix.
Riccardo Petrella propose quant à lui de commencer par l’élimination des armes nucléaires sachant que cette élimination est actée par le TNP (Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires) signé et ratifié par la France.
5 – L’AFCDRP-Maires pour la Paix France se propose de contribuer à la connaissance de cette notion de Culture de la paix et d’en faire un outil de gestion, de développement des territoires et de management en général.
6 – Les collectivités territoriales membres de Maires pour la Paix (plus de 7000 dans 161 pays en juin 2016) nous proposent des formes d’action diverses, adaptées à leur histoire et à leurs moyens, proche de tous les citoyens, quel que soit leur origine, leurs diplômes, leur métier, leur genre, etc. à travers leurs PLACP (Programmes Locaux d’Action pour une Culture de la Paix), outils de transversalité, de mutualisation, de partage, de sécurité collective, pour un management responsable et solidaire fondé sur le confiance et le respect mutuels.
Un ouvrage en préparation, Cultivons la paix, développe ces aspects de notre monde contemporain. Aspects qui ne peuvent pas ne pas avoir de résonance sur nos vies présentes.