Par Catherine Margaté, maire de Malakoff, conseillère générale des Hauts-de-Seine, vice-présidente de Maires pour la Paix.
Cinq mille collectivités locales, de cent cinquante et un pays, font maintenant partie du réseau Mayors for Peace (Maires pour la Paix) créé par les maires d’Hiroshima et de Nagasaki. Cette étape importante, et dont nous sommes fiers, appelle quelques réflexions en cette année 2011 marquée, au Japon, par des évènements dramatiques dont l’ampleur dépasse les frontières de ce seul pays.
Qu’un tel nombre d’institutions territoriales, caractérisées par leur proximité avec les citoyens, participe à notre réseau nous encourage à souhaiter un débat sérieux, serein, approfondi et démocratique sur les questions de la paix et des armes nucléaires. La légitimité de cette demande est renforcée par le fait que la sécurité et la santé des habitants de nos collectivités font partie de nos préoccupations permanentes.
Notre monde vit des temps troublés dont l’influence sur notre quotidien ne peut pas être ignorée. Les évolutions attendues tardent à venir mais à en juger par les propositions constructives de nombreux acteurs, nous devons espérer et continuer d’agir. Malgré les tensions, nous rappelons avec force que les moyens existent pour améliorer la vie de chacun.
Parmi les questions clés de notre siècle, il y a donc celle de la paix et en particulier de son volet nucléaire. Nous sommes nombreux à vouloir qu’un débat approfondi leur soit consacré, tant en France que dans tous les autres pays de notre planète. La catastrophe de Fukushima nous en a montré le besoin profond et en a souligné l’urgence. Nous savons désormais que des accidents nucléaires, s’ils sont rares, sont toujours possibles et particulièrement graves. Ils peuvent dépasser les meilleurs experts, bousculer tous les plans de sécurité et rendre des pans entiers de la terre impropres à toute activité humaine pour longtemps. Ce constat doit guider le contenu des débats futurs. Comme le dit Keisuke FUSE, syndicaliste japonais, « sur l’ampleur des fuites radioactives, les scientifiques évoluent en aveugles, incapables d’évaluer les besoins, de faire des projections sur les risques encourus et de définir une quelconque politique de prévention ».
La notion de culture de la paix, proposée par les États membres des Nations Unies et mise en œuvre par l’UNESCO, offre des outils d’action concrets qui sont de nature à transcender les vaines polémiques et placer le « vivre ensemble en paix » au cœur de l’action quotidienne… Les armes nucléaires sont incompatibles avec l’aspiration fondamentale de nos concitoyens à la paix et au continuum humain. De surcroît, elles sont parfaitement inopérantes dans nos situations de crise économique actuelles qu’elles aggravent même par le poids insoutenable de leur coût…
Le débat sera évidemment complexe. Il peut être abordé de multiples façons. Actuellement, nous constatons qu’il est parfois prisonnier d’une alternative trop simple : pour ou contre !
Parmi les éléments à prendre en compte, nous aurions intérêt à saisir toutes les nuances de la réalité sociale, environnementale, climatique… Plus qu’une nuance, une véritable différence existe entre le nucléaire civil et le nucléaire militaire. Il est tentant de considérer que les deux sont inséparables mais il se trouve que, en matière militaire, différence majeure, un consensus a déjà été trouvé pour l’élimination des armes atomiques. En effet, la grande majorité des États, dont la France, a ratifié et signé le Traité de non-prolifération qui prévoit l’élimination de ces armes (article VI). Ce traité doit devenir un point d’appui essentiel pour les débats à venir, même si nous devrons tout de même nous interroger sur les obstacles rencontrés pour l’appliquer !
Trouver rapidement un accord sur la mise en œuvre d’un traité déjà signé ne devrait pas être mission impossible et permettrait en l’occurrence de disposer de moyens humains et financiers utiles à l’ouverture de nouvelles perspectives pour toutes les autres voies qui restent à explorer.
Les 5000 collectivités de notre réseau soutiennent les efforts des Nations Unies et le programme en cinq points pour l’élimination des armes nucléaires proposé par le Secrétaire Général Ban Ki-moon. Sur ces bases, l’AFCDRP, branche française de Maires pour la Paix, invite les candidats aux prochaines élections de 2012 à proposer des solutions audacieuses dont la France sortirait grandie.
L’AFCDRP est évidemment à la disposition de tous pour apporter sa contribution aux débats à venir. Elle donne aussi la parole, ce qui est rare, à des citoyens japonais dont il est nécessaire d’entendre et comprendre l’expérience à plus d’un titre !