Ne cherchons pas les mots pour expliquer les évènements des 7, 8 et 9 janvier. Pensons simplement aux victimes, à leurs proches, à leurs amis, si nombreux et disons-nous, avec le poète, « qu’il est encore fécond le ventre d’où naquît la bête immonde ». Surtout, ne nous laissons pas dominer par l’émotion ou la peur ! Ces évènements de janvier confirment une évidence : tout ce qui a été fait pour apaiser le monde ne suffit pas.
Aujourd’hui, des dessinateurs sont victimes de meurtres organisés. D’autres aussi. Qui demain ? Disons-nous aussi que, si en 2006 ces mêmes dessinateurs ont créé Cartooning for Peace, sous l’égide des Nations Unies, ce n’est pas un hasard. Ils ont choisi de faire référence à la Paix… A la Culture de la Paix, comme elle est définie, justement par l’ONU.
En 2000, les Nations Unies ont adopté le Manifeste pour une Culture de la paix à la demande de nombreux Prix Nobel. Toutes les institutions de tous les pays furent invitées à faire vivre au quotidien cette notion novatrice et ses huit principes. D’aucuns ont souri. La paix serait sympathique mais pas suffisamment concrète, voire naïve ! Heureusement d’autres ont appelé à prendre en compte ce matériau d’une nouvelle culture dans leurs actions et dans leurs comportements collectifs ou individuels. Les élus dont la collectivité était membre de L’AFCDRP-Maires pour la Paix France (Association Française des Communes, Départements et Régions pour la Paix) proposèrent aux assemblées élues d’adopter le manifeste diffusé par l’UNESCO. Beaucoup l’ont fait à l’unanimité.
Déclarer vouloir la paix, certes, ne suffit pas, mais, sans cette proclamation solennelle, sans le récit répété et partagé de cette volonté, qui entreprendra de bâtir la Paix ? Notre expérience des PLACP (Programmes Locaux d’Action pour une Culture de la Paix) proposés par l’AFCDRP nous enseigne qu’il faut bien commencer par vouloir pour pouvoir !
Les évènements montrent qu’il est urgent de se donner les moyens de construire la paix en toutes circonstances.
Plusieurs philosophes et nos amis survivants d’Hiroshima et Nagasaki nous ont alertés : le 20ème siècle a fait accéder les humains au pouvoir absolu d’exterminer toute l’humanité. Deux villes japonaises symbolisent désormais ce pouvoir. Cela fera 70 ans en août 2015.
Ce pouvoir, en dépréciant, en dévaluant, en désacralisant l’humain, ouvre la porte à toutes les dérives. Affirmer sa volonté de paix, n’est-ce pas déjà Résister en toute lucidité à la barbarie, à toutes les barbaries et démontrer que la paix est plus forte que toutes les haines ?
Il n’est pas trop tard pour mobiliser les énergies fraternelles, toutes les forces convergentes autour des valeurs de « l’être ensemble » de la République et aller chercher les égarés… Il n’est pas trop tard pour activer des outils capables de disqualifier l’obscurantisme, de libérer celles et ceux qui se font prendre dans ses pièges. La misère et l’injustice que nous devons aussi combattre n’excusent pas tout.
De tels souhaits appellent des moyens qui soient à la portée de tous. Dans le droit fil de sa mission, de sa vocation, l’AFCDRP suggère d’adopter des PLACP dont le premier acte concret serait d’ouvrir, en permanence, dans nos mairies, nos écoles, nos médiathèques, nos lieux de culte et tous les lieux symbolisant l’ « être ensemble », tous les services publics et toutes les entreprises, des livres d’or, des cahiers d’espoir, des blogs, des sites web où chacun pourra écrire et lire ce que la Culture de la paix signifie. L’AFCDRP suggère aussi, avec l’UNESCO, que la notion de Culture de la paix soit inscrite aux programmes scolaires, de la maternelle à l’université et que soit créé un institut public et laïc consacré à l’étude de la notion de Culture de la Paix et à ses déclinaisons dans tous les domaines, dont, en particulier, la formation des citoyens dont la démocratie a besoin pour prévenir le malaise et traiter ses véritables causes.
Philippe RIO
Président
&
Michel CIBOT
Délégué général