4 mai : Discours intégral de Ban Ki-moon à la Conférence organisée par Mayors for Peace

Par   5 mai 2010

Traduction non officielle de l’intervention de Ban Ki-moon, Secrétaire général de l’ONU, le 4 mai 2010 lors de la Conférence organisée par Mayors for Peace (Maires pour la Paix), au siège des Nations Unies (New York), en marge de la Conférence d’examen du TNP. Texte original en anglais disponible sur le site du Secrétaire général

M. le Président de Mayors for Peace et Maire d’Hiroshima, M. Tadatoshi Akiba,
C’est un grand plaisir que de vous rencontrer une nouvelle fois et je vous remercie pour vos capacités de leadership.
M. le vice-président et Maire de Nagasaki, M. Tomihisa Taue, honorables maires, vos Excellences, Mesdames et Messieurs,
Good morning, bonjour, buenos dias, ni hao, salam alakum. J’ai rencontré beaucoup de maires divers provenant de différentes régions.
Tout d’abord, je voudrais vous remercier pour votre invitation.
J’attends cette réunion depuis longtemps.
Votre rôle n’est pas simplement important.
Il est essentiel. Absolument essentiel.
Construire un monde pacifique ne commence pas dans les salles de conférence à New York ou à Genève.
Cela commence sur le terrain, dans les quartiers, dans les communautés.
Cela commence par des leaders éclairés dans les villes et villages partout dans le monde.
Cela commence avec vous.
Et vous êtes en première ligne.
 
Mesdames et Messieurs,
Nous nous inquiétons tous de la prolifération. Nous nous inquiétons de la prolifération et des matières fissiles.


Mais nous accueillons aux Nations Unies une nouvelle forme de prolifération. Il s’agit de la prolifération internationale en faveur du désarmement nucléaire.
Ce soutien se répand rapidement et Mayors for Peace montre le chemin.
Il me semble que vos rangs comprennent maintenant environ 4000 maires et autres acteurs locaux du monde entier.
Bientôt, cette année, ce chiffre pourrait atteindre les 5000, représentants un milliard de personnes à travers le monde.
C’est le genre de fondation politique solide dont nous avons besoin pour réaliser l’objectif d’un monde exempt d’armes nucléaires.
Je félicite Mayors for Peace de son succès. J’admire tout particulièrement votre projet « Nos villes ne sont pas des cibles » et la campagne « Vision 2020 ».
Je suis d’accord avec votre approche. Nous devrions agir selon un calendrier précis pour qu’au moins quelques hibakusha soient en vie pour voir la fin de toute arme nucléaire.
Plus l’on regarde de près les terribles conséquences humanitaires, économiques et environnementales d’une attaque nucléaire, plus il devient clair qu’il faut désarmer maintenant.
La Conférence d’examen du TNP de 2000 le formule clairement : « l’élimination totale des armes nucléaires est la seule garantie absolue contre la menace d’utilisation d’armes nucléaires ».
Et les États dotés d’armes nucléaires ont approuvé. Ils ont appelé cela un « engagement sans équivoque ».
Les dirigeants des plus petites villes aux plus grandes organisations internationales reconnaissent cette vérité.
Ils savent qu’il n’y a aucune alternative. Ils comprennent que les demi-mesures ne nous apporteront jamais une tranquillité totale.
Ils savent qu’il n’y a pas d’alternative à l’appel qui émane partout de toute personne de bon sens : Désarmons maintenant !
La dissuasion nucléaire ? Des hommes d’état expérimentés la critiquent de plus en plus, la considérant comme dangereuse et dépassée.
Des contrôles sur l’exportation ? Cela n’a pas empêché des pays d’acquérir des armes atomiques.
Des sanctions ? Elles ont un rôle à jouer pour décourager la prolifération mais n’offrent aucune solution à long terme.
Les efforts de non-prolifération sont nécessaires. Mais ils ne sont pas suffisants. Ils fonctionnent mieux quand ils sont combinés à des mesures de désarmement.
C’est pourquoi, en octobre 2008, j’ai proposé mon plan en 5 points sur la non-prolifération et le désarmement nucléaire. Je remercie Mayors for Peace de son profond soutien à ces propositions pratiques et de bon sens.
 
Premièrement, le désarmement doit renforcer la sécurité.
C’est pourquoi j’ai exhorté le Conseil de sécurité à renforcer les efforts de désarmement et à améliorer la protection contre les armes non-nucléaires. Cela a facilité la tenue de la rencontre au sommet sur la sûreté nucléaire en septembre dernier, mais cela ne doit pas rester un évènement unique.
 
Deuxièmement, le désarmement doit être vérifié de façon fiable.
J’ai proposé que des négociations commencent soit sur une convention sur les armes nucléaires soit sur un calendrier d’outils séparés, se renforçant mutuellement. Je suis heureux que Mayors for Peace ait appelé à une initiative similaire dans son Protocole Hiroshima-Nagasaki.
 
Troisièmement, le désarmement doit être enraciné par des obligations légales.
Cela signifie l’adhésion de tous les pays aux traités multilatéraux et aux zones exemptes d’armes nucléaires régionales. Cela signifie également l’élaboration d’un nouveau traité sur les matières fissiles et l’entrée en vigueur du Traité d’interdiction complète des armes nucléaires – TICEN. Et, comme je l’ai dit hier, nous devons penser très sérieusement à mettre en place un calendrier de ratification – et à un mécanisme alternatif qui nous y mènerait.
 
Quatrièmement, le désarmement doit être visible.
Nous ne savons toujours pas précisément combien d’armes nucléaires il existe sur terre. Les pays dotés de l’arme nucléaire devraient donner plus d’informations sur ce qu’ils font pour remplir leurs engagements en matière de désarmement. Je me réjouis de l’annonce faite hier par les États-Unis et la Secrétaire d’État et incite chacun à fournir des efforts constants.
 
Cinquièmement et dernièrement, le désarmement doit aborder les dangers des autres armes.
Je souhaite vivement des progrès dans l’élimination de toutes les armes de destruction massive et dans la limitation des missiles, des armes spatiales et des armes conventionnelles – de tels efforts sont nécessaires pour un monde plus sûr, plus stable.
 
C’est mon projet – 5 étapes raisonnables pour parvenir à un monde sans armes nucléaires.
Il est ancré dans cette façon de voir les choses :
Nous réduisons le risque des armes nucléaires à zéro en réduisant le nombre d’États dotés d’armes nucléaires à zéro.
Puisque c’est réellement un objectif mondial, je crois que les Nations Unies devraient être un nouveau « Ground Zero » pour le désarmement nucléaire.
C’est le message que j’emporte avec moi où que j’aille.
Et c’est ce message que j’emmènerais avec moi lorsque je me rendrais à Hiroshima en août.
Je suis honoré d’être le premier Secrétaire général de l’histoire des Nations Unies à participer à la Cérémonie du Mémorial de la Paix d’Hiroshima.
J’estime que c’est ma responsabilité vis-à-vis des centaines de milliers de personnes qui furent tuées ou blessées lors de ces attaques.
Et j’éprouve une responsabilité équivalente envers les générations futures. Je ressens un devoir profond de faire avancer, par tous les moyens pratiques possibles, la grande cause du désarmement nucléaire afin que plus personne n’ait à craindre une nouvelle attaque de la sorte.
 
Mesdames et Messieurs les Maires, Mesdames et Messieurs,
Ces grands objectifs ne peuvent être atteints seul. Il faudra chacun d’entre nous.
Merci d’élargir le cercle de l’engagement et de l’action.
Merci de mobiliser un ensemble de consciences pour un monde sans armes nucléaires.
Mais en plus de ce que vous avez déjà fait, je vous encourage à faire encore plus.
Écrivez des articles. Mobilisez les gens. Demandez aux dirigeants de s’expliquer.
Dites-leur, franchement, simplement : combien de temps devons-nous attendre ?
Combien de temps devrons-nous voir de précieuses ressources détournées au profit des armes plutôt que des gens ?
Combien de temps devrons-nous entendre les mêmes excuses qui nous mènent dans les mêmes cercles ?
Combien de temps devrons-nous rester là et voir les menaces se développer ?
Nous avons attendu suffisamment longtemps. C’est maintenant le moment de l’action.
J’ai de l’espoir.
Cet espoir n’est pas fondé sur une utopie.
Il vient de ce que j’ai vu et entendu – des leaders mondiaux, de la société civile, des étudiants et de personnes âgées et avant tout de vous ici aujourd’hui.
Votre sagesse. Votre voix. Votre énergie.
Continuons !
Un monde plus sûr, plus juste, un monde plus stable, est à notre portée.
Emmenons nos enfants là-bas.
Merci beaucoup pour votre leadership et votre engagement. Thank you very much et merci beaucoup.